Deuxième séjour à Niamey. La première fois, j'avais été malade.

lundi 11 octobre 2010

téléphone maison


Il était temps de prendre internet à la maison. Au Niger, deux choix s’offrent à nous : Orange et la Sonitel. L’un est français, l’autre nigérien. Tous les deux ont plus ou moins la même réputation, c’est-à-dire que l’on entend les avis les plus contradictoires. Certains te dépeindront un parcours cauchemardesque avec le service après-vente alors que d’autres n’ont jamais eu aucun problème. Au niveau prix ? Sensiblement la même chose, Orange est un peu plus cher.

Je vais me renseigner à l’agence Orange. Décoration Orange, employés commerciaux, salle climatisée, vitrines qui exposent des téléphones modernes, contrats imprimés en couleurs, tout respire le marketing et l’entreprise européenne. Petite restriction, pas très embêtante, mais tout de même : l’abonnement ne permet la connexion (128 k) que les soirs et week-end.

Ce sera donc la Sonitel. J’y vais un mercredi après-midi, l’agence est un peu plus loin, il fait chaud et j’y vais en vélo.

L’agence Sonitel est le frère ennemi de l’agence Orange : tout respire le non-marketing. Dans le local défraîchi, trois vieux bureaux d’administration et quatre femmes en boubou. Il n’y a pas de clients, les employées soit papotent, soit attendent en silence, voire piquent un petit somme. Je suis invité à remplir les contrats (mal) photocopiés. Après la vérification silencieuse de la femme qui m’a tendu les contrats, elle part à l’arrière du local en disant qu’elle va voir si le technicien est là. J’attends.

Je n’ai pas emmené de livre, j’ai tout le loisir d’observer la folle activité de la Sonitel. Une femme va mettre en route le ventilo et se rassied. Une autre s’endort. Un client rentre et une discussion s’engage à propos d’une sombre histoire de billet de 1 000 f CFA. Je patiente et transpire.

Vingt minutes* plus tard, je demande à l’une des femme qui est là si la femme des contrats va revenir bientôt. Elle me dit “Ah bon, c’est elle que vous attendiez? Je vais voir”, et elle part à son tour par la même porte. J’attends.

La femme des contrats revient, elle me dit “Excusez-moi, le technicien n’est pas là” J’en avais eu l’intuition, à vrai dire. “Je vais voir là-bas”. Elle repart par la porte d’entrée. J’attends.

Cinq minutes plus tard, Elle revient. “Il est aux toilettes”. Bon, je vais attendre qu’il ait fini, alors.

Mais le voilà, il arrive ! Il règle deux ou trois choses avec les comparses qui l’accompagnent, veut s’en aller, la femme aux contrats le retient et l’invite à (lui ordonne de ?) me parler. Il me demande où j’habite et lui répond 256 avenue de Niamey (petit aparte : c’es le nom qui est inscrit sur la plaque de ma rue, et c’est le numéro à ma porte. Le problème est que personne ne connaît la rue sous ce nom-là. Ni les chauffeurs de taxi, ni les gens qui habitent dans la rue, ni personne. C’est d’ailleurs un syndrome généralisé à toute la ville, les routes portent un autre nom que ceux sous lequel elles ont été baptisées.) Il ne voit pas où c’est, je m’y attendais un peu et entreprends de lui expliquer. Au milieu de mon explication, il me dit : “Ah mais vous n’êtes pas à la bonne agence. Il faut aller à Plateau I.” Je lui réponds que j’y suis déjà allé, et qu’on m’a dit que c’était ici. Visiblement embêté, il me demande de recommencer mon explication, ce que je fais. Il ne voit toujours pas, appelle un de ses comparses à qui je ré-explique le chemin. Lui non plus ne voit pas. J’égrène tous les signes de reconnaissance qu’il y a à côté de la maison, de l’ONG au resto, en passant par le moindre commerce, rien n’y fait. Me voilà à faire un plan au-dessus duquel on discute, un troisième comparse étant venu nous aider.

Ça y est, il voit. Il me dit “c’est bon, je vois. Pas de problème”. Je suis soulagé, il s’en va par la porte arrière. N’ayant pas de directive précise, je me rassieds et entreprends d’attendre son retour.

Au bout de 10 minutes, je sens que j’ai commis une erreur, je n’aurais pas dû le laisser partir. Je demande à une des femmes, qui me dit “Ah bon, c’est le technicien que vous attendez ? Je vais voir.” Elle part par la porte de derrière. J'attends.

Elle revient quelques minutes après accompagné dudit technicien. Il dit un brin agacé par je ne sais quoi : “Maintenant, il faut saisir !”, bien que cette évidence ne m’est pas sauté aux yeux. Il attrape le dossier, et le tends à une des femmes devant l’ordinateur. J’ai juste le temps de me rendre compte que sur la photocopie qu’il tend, ce n’est ni mon nom, ni ma photo. Devant ma remarque, il farfouille sur le bureau et retrouve mon dossier, qu’il pose devant la femme à l’ordinateur, puis tente de s’enfuir. Une des femmes vient à mon secours et me crie de son bureau : “Prenez son numéro ! Prenez son numéro !” Beau joueur, le technicien me l’inscrit sur un bout de papier qui traîne, me promet de venir demain.

L’agence est subitement prise d’une activité inattendue, ça sort, ça rentre, des interpellations en zharma sont échangées, la femme à l’ordinateur n’est pas en reste et doit se lever pour je ne sais quoi. Elle est remplacée quelques secondes plus tard par une autre. Dès que l’activité soudaine s’est tue, la nouvelle femme, me voyant devant son bureau, elle me dit : “Oui, Vous voulez quoi ?” C’est pour saisir mon dossier “Oui, il est où ?” Je lui montre. Je lui demande quelques explications : quand paye-t-on, quand la ligne sera-t-elle ouverte, etc. Elle me répond qu’on a juste à saisir le dossier dans l’ordinateur, je paye et le technicien vient de suite. Cette heure et demi à la Sonitel n’aura donc pas été vaine.

Elle attrape sa souris, et c’est là qu’on entend le bruit caractéristique de la coupure d’electricité : le ventilo s’arrête, les ordinateurs aussi. Imperturbable, je demande ce qu’on fait maintenant. “Il faut attendre que l’electricité revienne”.

J’attends ?



NB : Tout est rigoureusement authentique.

* Je n’en ai pas rajouté sur les minutes. Je n’ai pas chronometré, mais vu le temps total que j’y ai passé, je crois être en dessous de la vérité.

1 commentaire:

Gil a dit…

Hello, est-ce que c'est ici le blog de Pascal ? !

En tous cas, ton histooire nous a beaucoup fait rire ma femme t moi ^^
Et solidarité ac les emmerdes Sonitel : moi le technicien m'a demandé une "avance" de 5000 CFA pour m'installer l'internet plus vite, tu parles, je suis retourné ce matin après quatre jours sans nouvelles : "On vient à midi !", mais toujours rien depuis.

A jeudi au zarma ?
-Gil